Toutes les associations traitées font part d’une seule classe, les Rudereto-Secalinetea, qui comprennent deux ordres, les Secalinetalia et les Chenopodietalia. L’existence de ces groupements dépend en premier lieu de l’action anthropogène, qui crée le milieu apte au développement des espèces constituantes. Ces espèces sont presque toutes des immigrants de contrées plus méridionales et le cortège floristique de ces cultures s’enrichit, encore constamment de nos jours. Dans l’Europe moyenne l’étude des Rudereto-Secalinetea est en général assez négligée. Des tableaux d’associations manquent presque complètement. Pour les Secalinetalia, on n’a distingué qu’une alliance avec deux associations; l’une avec Scleranthus annuus sur sol siliceux et l’autre avec Scandix pecten veneris sur sol calcaire. Pour les Chenopodietalia on a décrit une seule association, qui fait partie du Polygono-Chenopodion polyspermi. Ces associations ont été décrites sous des noms différents (voir pour la synonymie p. 329 et 365). Dans son importante publication de 1937, M. Tüxen sépare les unités d’ordre supérieur de la région méditerranéenne de celles de l’Europe moyenne ( Secalinion mediterraneum, Secalinion medioeuropaeum, Chenopodietalia mediterranea et Chenopodietalia medioeuropaea). Nous n’avons pas pu suivre cette séparation géographique et nous nous contentons de distinguer deux ordres subordonnés aux Rudereto-Secalinetea. Les Secalinetalia. comptent une seule alliance, le Secalinion, que nous proposons de subdiviser en deux sous-alliances, le Scleranthion annuae et le Triticion sativae. La première est caractérisée par rapport à l’autre par Scleranthus annuus, Spergula arvensis et Rumex acetosella. Elle se trouve sur les sols siliceux et acides, presque exclusivement cultivés avec du seigle et de l’avoine. Par contre le Triticion sativae occupe les sols alcalins où croissent aussi le froment et l’orge. Ranunculus arvensis, Scandix pecten veneris et Alopecurus myosuroides sont des espèces caractéristiques de cette sous-alliance. Le Secalinion comprend chez nous les groupements suivants, que nous avons énumérés d’après l’importance des espèces acidiphiles et basiphiles. Scleranthion annuae. i) Arnosereto-Scleranthetum (Chouard) Tx. avec deux sousassociations, la sous-association typicum sur sol sec et celle a Juncus bufonius sur sol plus humide (voir tableau I). L’association est répandue et très bien développée dans la partie diluviale des Pays-Bas, où elle se trouve surtout dans la zone culturale autour des villages sur des sols amendés pendant des siècles avec de la litière des landes. Pour la répartition voir la carte de l’espèce caractéristique, Arnoseris minima. 2) Avenetum fatuae n. nov. (tableau II). Nous n’avons rencontré cette association que sur le „loess” décalcifié dans le sud de la province Limbourg. Elle est signalée de même dans la région avoisinante de la Belgique par M. Mosseray. 3) Galeopsetum speciosae n. nov. (tableau III). La répartition de cette association ressemble à celle de Arnosereto-Scleranthetum, mais dans cette aire géographique, elle est limitée aux sols plus riches en matière organique. Souvent on la rencontre sur la transition de deux formations géologiques. 4) Papaveretum argemonae (Libbert) n. nov. (tableau IV). Ce groupement bien individualisé a été décrit par Libbert en 1932 sous le nom de l’ass. à Scleranthus annuus et Myosurus minimus. On la trouve sur sol argilo-sablonneux, à réaction faiblement acide ou neutre. Dans les Pays-Bas elle est répartie surtout le long des grands fleuves (voir la carte de Veronica triphylla et Holosteum umbellatum). Triticion sativae. 5) Vicietum tetraspermae n. nov. (tableau V). La répartition de cette association ressemble beaucoup à celle de la précédente (voir la carte de Vicia tetrasperma). Elle est localisée sur les sols fortement argileux. La réaction est à peu près neutre. Le tableau Va montre la relation entre la composition floristique et la teneur en argile du sol. 6) Linarietum spuriae n. nov. (Tableau VI). L’association se développe en automne dans les champs d’éteule sur sol argileux, imperméable et riche en calcaire. Elle ressemble dans son écologie à l’association méditerranéenne à Polycnemum arvense et Linaria spuria. On la trouve le long des grands fleuves et dans le sud du Limbourg (voir la carte de Linaria elatine). En dehors des associations du Triticion sativae nommées ci-dessus il y en a encore d’autres (voir le relevé, p. 358), qui ne sont pas encore suffisamment étudiées. Dans l’ordre des Chenopodietalia, les associations culturales appartiennent toutes à l’alliance du Polygono-Chenopodion polyspermi. A cette alliance s’attachent les associations suivantes: i) Panico-Chenopodietum polyspermi (Br.-Bl.) Tx. (tableau VII) avec deux sous-associations, le typicum et celle à Bidens tripartitus. Ces groupements remplacent dans les cultures sarclées l’Arnosereto-Scleranthetum du blé. Ils montrent aussi la même répartition dans le pays (voir les cartes de Echinochloa crus galli et Setaria viridis). 2) Mercurialetum annuae n. nov. (tableau VIII). La description de ce groupement est provisoire. L’association se trouve sur les mêmes sols que le Vicietum tetraspermae, mais elle est limitée aux cultures sarclées. La carte de Mercurialis annua. caractéristique locale de l’association, montre la répartition du groupement. Le Galeopsetum speciosae est remplacé dans les cultures sarclées par une végétation intermédiaire entre le Panico- Chenopodietum et le Mercurialetum annuae (tableau IX). 3) ‘ Veroniceto-Lamietum hybridi n. nov. Parfois ce groupement remplaçant le Linarietum spuriae du Secalinion se trouve dans le blé sur l’argile, azotée et riche en calcaire, mais généralement l’association se développe seulement dans les cultures de pommes de terre, de betteraves, etc. On rencontre cette association sur l’argile dans les „polders” de la Hollande et dans le district des grands fleuves (voir la carte de Veronica polita). Le Bidentetum tripartiti, qui se développe dans les champs sur sol tourbeux n’est pas étudié ici. Notre schéma, à p. 380, montre les relations entre les associations du Secalinion et celles du Polygono- Chenopodion polyspermi. Toutes ces associations sont liées les unes aux autres par des groupements de transition, et c’est ce phénomène qui a beaucoup compliqué l’étude phytosociologique. Le facteur écologique principal des groupements culturales est la méthode d’agriculture adoptée. C’est surtout le choix du crû, qui joue le rôle prépondérant. Les associations du Secalinion se développent dans les cultures du blé. Par contre les associations des cultures sarclées font toutes partie du Polygono-Chenopodion. Les associations de chaque alliance possèdent leur propre périodicité. Pour le Secalinion la germination commence en automne et en hiver. De même l’époque de floraison montre en général deux optimums, un au printemps lorsque le blé est encore bas, l’autre à l’époque où le crû lui-même fleurit. La maturation des fruits des espèces d’association est terminée, lorsque le blé est moissonné. Pour les associations du Polygono- Chenopodion, le développement des plantes ne peut commencer qu’au printemps. L’époque de floraison est reculée aux mois d’aôut et septembre. Toutes les associations ont en commun, le fait que leurs diaspores sont répandus pour la plus grande partie par l’homme (Molinier et Müller 1938). Puis il y a la charrue, qui cause la catastrophe dans le cycle de vie pour toutes les associations culturales. C’est pour les espèces constituantes le moment le plus défavorable et, seulement les thérophytes et les géophytes peuvent survivre à cette intervention. Le temps des semailles et des plantations mis à part, il y a probablement encore d’autres facteurs, comme la lumière et le métabolisme des cultures, qui influencent le développement des deux alliances. Ce sont pourtant les caractères du sol (composition mécanique et chimique, teneur en humus, acidité, etc.), qui déterminent, laquelle des associations s’installera, lorsque le choix de la culture est fait.